Rechercher dans ce blog

Paris ne finit jamais!

Paris ne finit jamais!
Le pont des Arts, la Seine et la Tour Eiffel

vendredi 11 juin 2010

Qu'est-ce que tu bouquines?

ANNEXE 9.1 : La première gorgée de bière, de Philippe Delerm
« Le cinéma»
Ce n’est pas vraiment une sortie, le cinéma. On est à peine avec les autres. Ce qui compte, c’est cette espèce de flottement ouaté1 que l’on éprouve en entrant dans la salle. Le film n’est pas commencé ; une lumière d’aquarium tamise les conversations feutrées2. Tout est bombé3, velouté4, assourdi. La moquette sous les pieds, on dévale5 avec une fausse aisance vers un rang de fauteuils vide. On ne peut pas dire qu’on s’assoie, ni même qu’on se carre dans son siège. Il faut apprivoiser6 ce volume rebondi, mi-compact, mi-moelleux. On se love7 à petits coups voluptueux. En même temps, le parallélisme, l’orientation vers l’écran mêlent l’adhésion collective au plaisir égoïste.
Le partage s’arrête là, ou presque. Que saura-t-on de ce géant désinvolte qui lit encore son journal, trois rangs devant ? Quelques rires peut-être, aux moments où l’on n’aura pas ri – ou pire encore : quelques silences aux moments où l’on aura ri soi-même. Au cinéma, on ne se découvre pas. On sort pour se cacher, pour se blottir8, pour s’enfoncer9. On est au fond de la piscine, et dans le bleu tout peut venir de cette fausse scène sans profondeur, abolie par l’écran. Aucune odeur, aucun coulis de vent dans cette salle penchée vers une attente plate, abstraite, dans ce volume conçu pour déifier10 une surface.
L’obscurité se fait, l’autel s’allume. On va flotter, poisson de l’air, oiseau de l’eau. Le corps va s’engourdir, et l’on devient campagne anglaise, avenue de New York ou pluie de Brest. On est la vie, la mort, l’amour, la guerre, noyé dans l’entonnoir11 d’un pinceau de lumière où la poussière danse. Quand le mot fin s’inscrit, on reste prostré, en apnée. Puis la lumière insupportable se rallume. Il faut se déplier alors dans le coton, et s’ébrouer12 vers la sortie en somnambule. Surtout ne pas laisser tomber tout de suite les mots qui vont casser, juger, noter. Sur la moquette vertigineuse, attendre patiemment que le géant au journal soit passé devant. Cosmonaute pataud13, garder quelques secondes cette étrange apesanteur14.

Les mots difficiles et leurs équivalents :
1 Ouaté : Peu sonore, amorti
2 Feutré : Discret, silencieux, étouffé, peu sonore
3 Bombé : Arrondi, courbe
4 Velouté : Doux à toucher comme du velours
5 Dévaler : Descendre brutalement ou très rapidement
6 Apprivoiser : Domestiquer, dompter, adoucir
7 Se lover : S’enrouler sur soi-même
8 Se blottir : Se ramasser sur soi-même de manière à occuper le moins de place
9 S’enfoncer : S’installer tout à fond
10 Déifier : Diviniser,
11 Entonnoir : Cuvette
12 S’ébrouer : S’agiter, souffler en s’agitant, pour se nettoyer, se dégager de quelque chose.
13 Pataud : Gauche, maladroit
14 Apesanteur :


Annexe 9.2: Le questionnaire Proust
1. Ma vertu préférée
2. Le principal trait de mon caractère
3. La qualité que je préfère chez les hommes
4. La qualité que je préfère chez les femmes
5. Mon principal défaut
6. Ma principale qualité
7. Ce que j'apprécie le plus chez mes amis
8. Mon occupation préférée
9. Mon rêve de bonheur
10. Quel serait mon plus grand malheur ?
11. À part moi -même qui voudrais-je être ?
12. Le pays où j'aimerais vivre
13. La couleur que je préfère
14. La fleur que je préfère
15. L'oiseau que je préfère
16. Mes auteurs favoris en prose
17. Mes poètes préférés
18. Mes héros dans la fiction
19. Mes héroïnes favorites dans la fiction
20. Mes compositeurs préférés
21. Mes peintres préférés
22. Mes héros dans la vie réelle
23. Mes héroïnes préférées dans la vie réelle
24. Mes héros dans l'histoire
25. Ce que je déteste le plus
26. Le personnage historique que je déteste le plus
27. Les faits historiques que je méprise le plus
28. Le fait militaire que j'estime le plus
29. La réforme que j'estime le plus
30. Le don de la nature que je voudrais avoir
31. Comment j'aimerais mourir
32. L'état présent de mon esprit
33. La faute qui m'inspire le plus d'indulgence
34. Ma devise

Annexe 9.3 : La voix humaine, de Jean Cocteau
« Ah ! enfin…………………………………………………….c’est toi…………………….. oui………………..très bien………………………………………allô !…………………... oui………………………………………………………………C’était un vrai supplice de t’entendre à travers tout ce monde…………………………………………………………..
…………………….oui……………………………………………..oui…………………...
…………………………………………………………………………………………….… non…………………………………….c’est une chance………………………………….... Je rentre il y a dix minutes………………………………………………………………..Tu n’avais pas encore appelé ?………………………………………………………………….. ah! …………………………………….non,non…………………………………………J’ai dîné dehors……………………………………..chez Marthe………………………………. Il doit être onze heures un quart……………………………………………………………… Tu es chez toi ?…………………………………………………………………Alors regarde la pendule électrique…………………………………………………………………C’est ce que je pensais…………………………………………………………………..Oui, oui, mon chéri………………………………………………………………. ….Hier soir ? Hier soir je me suis couchée tout de suite et comme je ne pouvais pas m’endormir j’ai pris un comprimé
………………………………………………….non………………………………………….
un seul……………………………………..à neuf heures……………………… J’avais un peu mal à la tête, mais je me suis secouée. Marthe est venue. Elle a déjeuné avec
moi. J’ai fait des courses. Je suis rentrée à la maison. J’ai mis toutes les lettres dans le sac
jaune. J’ai…………………………Quoi ?………………………………………………..Très
forte……………………………….je te jure………………………………………………J’ai
beaucoup, beaucoup de courage……………………………………………………………….
……………………………………………………………..Après ? Après je me suis habillée, Marthe est venue me prendre et voilà…………………………………...Je rentre de chez elle. Elle a été parfaite……………………………………………………….…………...Très, très bonne, parfaite……………………………………………………………………Elle a cet air, mais elle ne l’est pas. Tu avais raison, comme toujours……………………………………….
…………………………………………………………………………..Ma robe rose, avec la fourrure…………………………………………………………………………..Mon chapeau noir……………………………………………………………………….Oui, j’ai encore mon chapeau sur la tête……………………………………………………………………non, non, je ne fume pas. Je n’ai fumé que trois cigarettes…………………………Si, c’est vrai……….
…………….Si, si………………………………………………………………………………
……………………….tu es gentil…………………………………………………………….. Et toi, tu rentres ?…………………………………………………………………………Tu es resté à la maison…………………………………………………………………………...Quel procès ?……………………………………………..Ah ! oui…………………………………. il ne faut pas te fatiguer…………………………………………………………………..Allô ! allô ! ne coupez pas. Allô !…………………………………………………………………….. allô ! chéri………………………………………….allô !…………………………………...Si on coupe, redemande-moi tout de suite………………………….naturellement……………… Allô ! Non…………………………………………..je suis là………………………………Le sac ?……………………………………………………………………………Tes lettres et les miennes. Tu peux le faire prendre quand tu veux………………………………………Un peu dur……………………………………………..Je comprends………………………………… Oh ! mon chéri, ne t’excuse pas, c’est très naturel et c’est moi qui suis stupide……………….
………………………………………………………………………………………………….
……….Tu es gentil…………………………………………………………………………….
………………………………………………………………………………………………….
…………………………………….. ………………………………Tu es gentil………………
…………………………………………………………………Moi non plus, je ne me croyais
pas si forte…………………………………………………………………………………….Il
ne faut pas m’admirer. Je bouge un peu comme une somnambule. Je m’habille, je sors, je
rentre machinalement. Je serai peut-être moins brave demain…………………………………
………………………………………………………………………………………………….
…………………………………………….. …Toi ?……………………………………
… Mais non………………………………………………………………………….…mais, mon
chéri, je n’ai pas l’ombre d’un reproche à te faire……………………….je…………………je
………………………………………………….laisse…………………………………………
Comment ?………………………………….……………………………………..Très naturel
…………………………………...Au contraire………………………………………………Il
…………………………………………………….………...il a toujours été convenu que nous agirions avec franchise et j’aurais trouvé criminel que tu me laisses sans rien savoir jusqu’à la dernière minute. Le coup aurait été trop brutal, tandis que là, j’ai eu le temps de m’habituer, de comprendre……………………………Quelle comédie ?…………………………………..
……………………………………………………Allô !……………………………… Qui ? …………………………………………………………………………....que je te joue la comédie, moi !……………………………………………………………………………Tu me connais, je suis incapable de prendre sur moi……………………………………….Pas du tout
………………………………………..Pas du tout……………………………………………..
Très calme………………………………………………………………………Tu l’entendrais
………………………………………………………………………….Je dis : tu l’entendrais.
Je n’ai pas la voix d’une personne qui cache quelque chose……………………………………
……………………………………………………………Non. J’ai décidé d’avoir du courage
et j’en aurai……………………………………………Permets……………………………….
……………..3 ce n’était pas pareil…………………………………………………………….
c’est possible, mais on a beau se douter, s’attendre au malheur, on tombe toujours à la
renverse…………………………………………………………………………………………
N’exagère pas ……..………………………………………………………………..j’ai tout de
même eu le temps de m’habituer. Tu avais pris le soin de me dorloter, de m’endormir………
Notre amour marchait contre trop de choses. Il fallait résister, refuser cinq ans de bonheur ou
accepter les risques. Je n’ai jamais pensé que la vie s’arrangerait. Je paye cher une joie sans
prix……………………………………Allô…………………………………………...sans prix
et je ne regrette……………………………………………je ne……………………………….
je ne regrette rien – rien- rien…………………………………………………………………..
…………………………………………………………………………………………………. Tu…………………………………………………………………………………………...tu te trompes……………………………………………tu te……………………………………tu te …..…………tu te trompes. J’ai………………………………………………………….
………………………………………….Allô !……………………………………………...j’ai ce que je mérites. J’ai voulu être folle et avoir un bonheur fou………………………………… chéri…………………………………………….écoute…………………………………...allô !
………………………………………………………………………………………chéri……..
………………laisse………………………………………allô………………………………… laisse-moi parler. Ne t’accuse pas. Tout est ma faute. Si,si…………………………………….. Souviens-toi du dimanche de Versailles et du pneumatique……………………Ah !………… Alors !……………………………………………………………………………..C’est moi qui ai voulu venir, c’est moi qui t’ai fermé la bouche, c’est moi qui t’ai dit que tout m’était égal…
…………………………………………………Non……………………………………………
…….non……………………………………………………………………….non……
là, tu es injuste……………………………………………….J’ai………………………………
j’ai téléphoné la première……………………………………………………………………….
non, le mardi………………………………………………………………………………….un
mardi………………………………………………………………….………….J’en suis sûre.
Un mardi 27. Ta dépêche était arrivée le lundi soir, le 26. Tu penses bien que je connais ces
dates par cœur………………………………………………………….ta mère ? Pourquoi… …………………..Ce n’est vraiment pas la peine……………………………………………....
…………………………..Je ne sais pas encore…………………………………………………
……………………..Oui…………………………………………..peut-être…………………..
Oh ! non, sûrement pas tout de suite, et toi ?…………………….Demain ?……………………
……………………………………………………………………Je ne savais pas que c’était si rapide……………………………………………….Alors, attends…………………………… c’est très simple………………………………………………………………………….demain matin le sac sera chez le concierge. Joseph n’aura qu’à passer le prendre……………………...
………………..Oh ! moi, tu sais, il est possible que je reste, comme il est possible que j’aille
passer quelques jours à la campagne, chez Marthe……………………………………………..
………………………………………………………………………………………………….
…………………………….Il est là. Il est comme une âme en peine. Hier, il passait son temps
entre le vestibule et la chambre. Il me regardait. Il dressait les oreilles. Il écoutait. Il te
cherchait partout. Il avait l’air de me reprocher de rester assise et de ne pas chercher avec lui...
………………………………………………………………………………………………….. Je trouve que le mieux serait que tu le prennes……………………………………Si cette bête doit être malheureuse…………………………………………………………………………… Oh ! moi !………………………………………………………………….………Ce n’est pas un chien de femme. Je m’en occuperais mal. Je ne le sortirais pas. Il vaudrait bien mieux qu’il reste avec toi…………………………………………………………………………………….
……………………………..Il m’oublierait vite……………………………………………….. Nous verrons……………………………………………………………………………….nous verrons………………………………………………………………………… …..Ce n’est pas bien compliqué. Tu n’aurais qu’à dire que c’est le chien d’un ami. Il aime beaucoup Joseph. Joseph viendrait le prendre………………………………………………………………...Je lui mettrais le collier rouge. Il n’a pas de plaque……………………………………..Nous verrons
………………………………………………..oui………………………………………………
……………………………..oui…………………………………………………………………
………………………………………oui, mon chéri…………………………………………... entendu…………………………………………………………………………...mais oui, mon chéri…………Quel gants ?……………………………………….……………………………..
……………..Tes gants fourrés, les gants que tu avais pour conduire la voiture ?……………...
…………………………………………………………………...Je ne sais pas. Je n’ai rien vu. C’est possible. Je vais voir……………………………………………………………………… Tu attends. Ne te laisse pas couper.
(Elle ramasse sur la table, derrière la lampe, des gants crispin fourrés qu’elle embrasse passionnément.
Elle parle avec les gants contre sa joue.)
Allô…………………………….allô………………………………….non…………………… j’ai cherché sur la commode, sur le fauteuil, dans l’antichambre, partout. Ils n’y sont pas…… Écoute………………………………………………………………………………..je vais voir encore, mais je suis certaine…………………………………………………………………….. Si par hasard on les retrouve demain matin, je les ferai mettre en bas avec le sac……………...
…………………………………………………….Chéri ?…………………………………….

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire